Cette semaine charnière, quasiment la plus importante depuis le début de l’année vous en conviendrez – en témoigne d’ailleurs la fascination mâtinée de mutisme respectueux avec laquelle nous avons commenté les premiers jours des tournois d’Eastbourne et S’Hertogenbosch – n’a comme tous les ans pas apporté d’éléments hautement significatifs quant à la conquête de la pelouse londonienne, mais a permis de sortir quelques affamés de l’anonymat ou de replonger quelques autres dans les abîmes du doute.
Et puis bien sûr, il y eut le tirage rocambolesque du tableau masculin, déjà abondamment commenté dans ces colonnes.
Les Tops :
· Benjamin Becker, Initiales B.B. L’autre Becker, son Benjamin de 14 ans, n’avait pas fait parler de lui depuis son seul parcours mémorable de l’US Open 2006 où il mit fin ironiquement à l’incroyable carrière de qui l’on sait. Comme quoi, jamais un coup de Dédé n’entravera le hasard. D’ailleurs, ce joueur complet, sorte de version allemande de Grosjean (également entraîné aux Etats-Unis), en un peu plus complet et beaucoup moins fulgurant, n’a jamais tellement fait parler de lui. Débarquant péniblement et progressivement de la 1000ème place mondiale, il est rentré dans le top 100 à la faveur de son périple new-yorkais… avant de monter jusqu’au 38ème rang puis de retomber gentiment.
Mais cette année, il revient telle une déferlante passée bizarrement inaperçue. Le gaillard a enchaîné 27 victoires pour 4 défaites dans le monde impitoyable des Challengers, soit 5 finales, toutes gagnées, sauf une cédée sur abandon. C’est peu dire que le Teuton est en confiance et a sorti une semaine de gros niveau en croquant tour à tour le débonnaire Serra, le bronzé Verdasco, le funoctambule Llodra, l’inoxydable Schuettler et l’inattendu Sluiter.
· Fabrice Santoro, médecin malgré lui. Quand son adversaire du jour, Ivan Ljubicic, trébuche et se tord la cheville sur le gazon d’Eastbourne, le Français est le premier à courir vers son sac pour en ramener des poches de glace et commencer à soigner le Croate. Mieux, il filera ensuite un coup de main au kiné qui prenait sa place au chevet du blessé.
· Raemon Sluiter, retour vers le futur. Il y a un peu plus d’un an, le trentenaire Néerlandais annonçait sa retraite. Mais le démon du jeu a été le plus fort : après une reprise plutôt concluante en tournois Futures, il a su profiter de la wild-card obtenue à domicile, à S’Hertogenbosch. 866e à l’ATP, il sort successivement Daniel Gimeno-Traver, Marcos Baghdatis (sur abandon), Dudi Sela et Ivan Navarro-Pastor : voilà l’ancien N°46 mondial (en 2003) en finale, où il sera finalement battu par l’Allemand Benjamin Becker. Pas de quoi gâcher une belle semaine qui a décidé Raemon Sluiter à jouer au moins jusqu’à la fin de l’année. A noter que, durant cette semaine, Sluiter avait amené dans ses bagages un autre jeune retraité, inscrit en double avec lui : Peter Wessels. En 1995, tous deux avaient remporté le double de Roland-Garros chez les juniors.
· Ivan Navarro, l’exception culturelle espagnole. Au fond, n’est-ce pas ironique de voir que l’un des derniers représentants au top-niveau du service-volée soit espagnol ? Ivan Navarro-Pastor ne fait pas de compromis avec l’histoire de son sport : service-volée sur première balle, service-volée sur seconde balle, retour-volée sur service adverse. Du chip and charge comme on n’en voit plus guère. Cette semaine, ce tennis d’un autre temps lui a permis d’atteindre les demi-finales à S’Hertogenbosch.
· Rainer Schuettler, le retour de la mort qui tue (brr…). Qu’on se le dise, les Boches sont en confiance. Après une bonne performance collective à Roland-Garros, le titre halal de Haase, pardon de Haas à Halle, celui de Becker à Bois-le-Duc, c’est Rainer qui a refait parler de lui en ne tombant que face à son compatriote susnommé.
Alors qu’il fût sorti 9 fois sur 14 au premier tour en 2009, l’insubmersible grognard et improbable demi-finaliste en titre a de nouveau démontré qu’il allait falloir se le coltiner. Le voir passer 3 tours à Wimbledon n’aurait vraiment rien de surprenant, et ça va sûrement être au douteux Nole de se le farcir (Schuettler-Robredo, je suis sûr que vos babilles en frétillent d’avance, à vos magnétos les mecs !).
· Tamarine Tanasugarn, gazon béni. Deux ans qu’elle nous fait le coup. A la rue onze mois sur douze (ou presque), la Thaïlandaise refait surface pour la saison de gazon, où son jeu de contre fait des merveilles. Pour la deuxième saison consécutive, Tanasugarn a remporté le tournoi de S’Hertogenbosch. Pour la deuxième saison consécutive, elle s’y est offert le scalp d’une certaine Dinara Safina. L’an dernier, ce tournoi avait été suivi par un quart de finale à Wimbledon. Rebelote en 2009 ?
· Thomas Johansson , l’adieu aux armes. Un coup de chapeau au vétéran suédois qui vient de prendre sa retraite, à 34 ans. Membre de la dernière belle génération que le tennis Varègue ait connu (avec les Bjorkman, Enqvist et Norman), Thomas Johansson a notamment remporté l’Open d’Australie en 2002 et le Master Series de Montréal en 1999. Sélectionné à 32 reprises en Coupe Davis, il a participé à la conquête du Saladier d’argent en 1998. Son dernier fait de gloire restera sa médaille d’argent en double aux Jeux Olympiques de Sydney, l’an dernier. Seul regret, sa carrière aura été tronquée par les blessures : alerte cardiaque en 1999, blessure à l’épaule en 2002, déchirement de la rétine en 2006 et finalement opération du pied fin 2008. Bonne route, Thomas !
Les Flops :
· Les organisateurs de Wimbledon ou Les apprentis sorciers. Evidemment, chaque méthode d’attribution des têtes de série à Wimbledon sera toujours sujette à critiques. N’empêche que, cette année encore, le résultat interpelle. Marat Safin écope d’une tête de série N°15 : lui qui n’a rien fait de marquant cette année est donc préservé d’une rencontre avec l’un des seize meilleurs avant les huitièmes de finale (en admettant que Marat aille jusque-là). Rainer Schuettler, N°19, ou Albert Montanes, N°32, ne se plaindront pas non plus du traitement qui leur a été réservé. Au contraire d’un Tommy Haas, récent vainqueur à Halle et qui ne doit sa tête de série qu’au forfait de Gaël Monfils.
A ainsi aimer jouer les apprentis sorciers, les organisateurs de Wimbledon s’exposent à de cinglants retours de bâton : rappelons que Lleyton Hewitt, tenant du titre éliminé au premier tour en 2003 par Ivo Karlovic, n’aurait jamais dû affronter le Croate. En effet, Hewitt, N°2 mondial, avait été promu tête de série N°1 au détriment d’Andre Agassi. Un peu plus loin de nous, on peut penser à Richard Krajicek, snobé par les organisateurs en 1996 : 13e mondial mais jamais à son avantage sur le gazon londonien les années précédentes, il n’avait pas reçu de tête de série. Tant pis : il s’est vengé en gagnant le tournoi !
· Les absents nous font du tort. Mario Ancic privé de Wimbledon pour cause d’une mononucléose qui fait passer celle du génie suisse pour un aimable rhume. Marcos Baghdatis qui n’en finit pas de scoumouner, cette fois aux genoux. Et bien sûr Nadal que son physique lâche pour la première fois à un moment vraiment très inapproprié (premier tenant du titre ‘out’ depuis Safin en 2006, premier n°1 out depuis l’US Open 1999), en espérant que ce ne soit pas le début d’un long calvaire pour lui.
Soit 3 joueurs ultra-sympathiques sortis du tableau avant même d’y faire leurs armes, voilà qui laisse comme un goût âcre dans la bouche.
· Marion Bartoli, seule contre tous. Bien sûr, Virginie Razzano n’a pas été tendre avec elle dans le quotidien L’Equipe («Marion est une super joueuse, elle est intelligente, je la respecte en tant que personne mais sur le court on a l’impression que tous les moyens sont bons chez elle pour gagner : appeler le soigneur, pleurer, boiter… Je ne la regarderai pas si elle prend plein de temps entre les points à faire ses mélis-mélos. Il n’y aura aucun respect et aucune pitié des deux côtés, ça ne veut pas dire que je ne l’aime pas. Simplement je ne veux pas me laisser déstabiliser sur le court»). Maintenant, était-ce vraiment nécessaire de refuser de lui serrer la main, alors que la Nîmoise venait prendre de ses nouvelles après son abandon ? Encore une fois, Marion Bartoli donne la désagréable impression d’entretenir le conflit avec ses compatriotes. Quitte, en ces temps difficiles pour le tennis féminin français, à plomber les chances des tricolores en Fed Cup. Espérons que l’âge venant, Marion réussira, à la manière d’un Cédric Pioline en son temps, à ouvrir quelque peu sa carapace…
· Amélie Mauresmo, femme pas si libérée que ça. On aurait pu penser que son bref passage au sommet du tennis mondial et surtout sa superbe victoire à Wimbledon l’auraient incité à relâcher la pression qu’elle semble se mettre en permanence sur les épaules, elle dont la qualité de jeu est principalement liée à son lâcher-prise et à sa confiance.
Mais non, tout comme Jana Novotna en son temps, la talentueuse française et quasi-dernière ambassadrice du revers à une main chez nos amies les femmes a la ténacité mentale d’un Flamby, ce qui lui a valu une énième déconvenue, cette fois à Eastbourne face à Marakova. 1ère manche : breakée, elle arrache le tie-break, mène 6 points à 2… mais non, perdu 10-8. 2ème manche : 4-0, puis 5-3. Oups, tie-break. C’est pas grave, 5 à 2 pour la frenchie. Ben non, ça fera 15-13. Remballez. Allez, c’est pas grave, elle connaît. Tu vas te reprendre à Wimby, Momo.
· Les matches truqués, quelque chose de pourri au royaume du tennis. Alors qu’on pensait le dossier plus ou moins enterré, le voici qui ressurgit par la grande porte. 6 à 12 joueurs, Russes, Argentins, Italiens et Espagnols, seront surveillés de « très près » dixit la presse (il n’y a que 4 italiens dans le tableau). No comment de la FIT ou du responsable de la section « tennis-intégrité » (mon Dieu, un truc pareil existe, c’est vraiment le règne du politiquement korrekt). De plus, on apprend que 3 matches (Koellerer/Hernandez à Den Bosch, un non cité à Kitzbühel et le Lisnard/C.Rochus de Monte-Carlo) sont dans le collimateur des enquêteurs pour des mouvements suspects chez les bookmakers. Ambiance…
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Tiens, personne n’a remarqué que le Almagro/Monaco s’était vu devancer par le Hanescu/Navarro : 251 minutes vs 238, malgré son nombre global de point inférieur.
C’est cette sangsue de Simon sans Garfunkel qui a encore les nouilles bordées de postérieur… tous ses adversaires potentiels se sont déjà tapés au moins un 5 set. Je le vois bien se faire atomiser en huitième du coup.
Quant à Federer, il doit être ravi de voir ses adversaires s’épuiser autour de lui. Il a joué 55 jeux, alors que Kohlschreiber en est déjà à 81, Almagro à 116 (!), Soderling à 85.
Dans sa moitié, les seuls qui s’en tirent vraiment bien sont Tsonga grâce au forfait de Bolleli et Haas grâce à l’abandon de Llodra.
Fish va être à surveiller : un Fish-Haas en quart ne serait pas pour me déplaire