En avant Roland, jour 15

By  | 6 juin 2010 | Filed under: Actualité

Di­manche 6 juin – le pro­gram­me du jour

Court Philippe-Chatrier, à par­tir de 15h :

Fin­ale sim­ple mes­sieurs : Robin Soderl­ing (Suède/TS7) – Rafael Nadal (Es­pagne /TS2). Une fin­ale inédite, mais une fin­ale dont la seule sur­pr­ise est l’abs­ence de Roger Feder­er. C’est logique­ment son vain­queur en quarts qui le re­mplace, de même qu’il avait logique­ment accédé à la fin­ale de l’année passée après avoir battu Rafael Nadal en huitièmes. Robin Soderl­ing est donc un cas­seur de duopole désor­mais récidivis­te. A t-il de meil­leures chan­ces de tri­omph­er que l’an passé ?

A en juger d’après les seules demi-finales dis­put­ées vendredi, la réponse est négative : si les deux pro­tagonis­tes évoluent au niveau qui a été le leur vendredi, con­tre des ad­versaires différents bien sûr, Rafael Nadal gag­nera aussi aisément cette fin­ale que l’avait fait Roger Feder­er l’an passé. Telle est du moins la con­clus­ion que j’ai tirée de ma journée passée avant-hier sur le Chat­ri­er.

Des deux matchs, le plus plaisant à voir fut de loin celui dont le résul­tat ne faisait que très peu de doute mais avant de pouvoir apprécier la re­ncontre qui op­posait l’Es­pagnol à Jurg­en Melz­er, il y avait un pen­sum à sup­port­er : les 3h23 de la première demi-finale dont le seul mérite fut le sus­pen­se qu’elle of­frit pre­sque jusqu’au bout. Comme il faisait chaud, c’était d’autant plus pénible à sup­port­er.

Pour­tant, sur le papi­er du moins, cette demie entre Be­rdych et Soderl­ing para­is­sait al­léchan­te. C’était sans com­pt­er avec le fait qu’ils jouent ex­ac­te­ment de la même manière, ont les mêmes for­ces et les mêmes faib­lesses, sans com­pt­er aussi avec le fait que plus d’un point sur trois se ter­mina par une faute di­rec­te ; sans com­pt­er enfin avec l’in­dig­ence tech­nique et tac­tique des deux pro­tagonis­tes. Ceux-ci n’eurent qu’une idée en tête : frapp­er le plus fort pos­sible au ser­vice, en coup droit, en re­v­ers, et c’est tout… On com­pta deux amort­ies sur 295 points dis­putés, moins d’un point sur dix à la volée, et cela valait d’ail­leurs mieux car si le point n’était pas déjà fait aux neuf dixièmes, ils furent sur­tout cap­ables de démontr­er leur in­capacité récip­roque à exécuter une volée cor­rec­te, tout par­ticuliè­re­ment Soderl­ing dont l’unique fait d’armes fût une volée amor­tie bien déposée… C’est peu, et ce fut au total assez affligeant. Au quat­rième set, un spec­tateur cria « Re­viens Roger ! », ce qui ne fit même pas rire le pub­lic tant l’am­bian­ce était morose. Il est vrai que per­son­ne ne s’avisa de crier « Re­viens del Potro ! » puis­que ses clones étaient sur le court…

Le pub­lic man­ifes­ta une légère préférence pour voir tri­omph­er le Suédois et finit par voir ses vœux exaucés : Soderl­ing gagna chacun des sets ou il fit moins de fautes di­rec­tes que de coups gag­nants et l’em­porta en ser­rant le jeu dans les deux de­rni­ers sets, plus sol­ide men­tale­ment que son ad­versaire qui, un peu fatigué à l’at­taque du cin­quiè­me, per­dit un peu d’ef­ficacité au ser­vice. Jus­que là, il avait mieux servi que Soderl­ing mais sa deuxième balle est un peu moins bonne que celle du Suédois et c’est ce qui fît la différence dans ses deux de­rni­ers jeux de ser­vice ou il ne passa qu’une seule première. Alors que la première tchèque avait perdu 10km/h, le Suédois com­men­çait à re­tourn­er en ce début de cin­quiè­me set et sur les secon­des du Tchèque, fit mouc­he. Be­rdych per­dit le match… Il ne fut pas re­gretté.

La secon­de demi-finale fut un grand bol d’air frais, pas seule­ment parce qu’il com­men­çait à faire moins chaud, mais parce que l’op­posi­tion de style et la tac­tique em­ployée par Melz­er per­mirent de com­pt­er de très nombreux points agréables à re­gard­er.

Au bout de 20 minutes, le ton était donné : Rafa menait 4-2. Dix minutes plus tard, il em­poc­hait tran­quil­le­ment le pre­mi­er set. C’est le mo­ment que choisit Melz­er pour chang­er de tac­tique : quit­te à per­dre, autant per­dre au filet, plutôt que de per­dre du fond du court où il n’avait de toute façon aucune chan­ce. Lui qui n’était monté que deux fois au pre­mi­er set, monta ainsi 18 fois au deuxième et 15 fois au troisiè­me ; le tout pour un bilan assez honor­able : 19 points re­mportés sur 35. Eton­nant de voir Melz­er faire service-volée con­tre Rafa sur terre mais au final, be­aucoup de points spec­taculaires, tout par­ticuliè­re­ment dans la meil­leure séqu­ence de l’Aut­richi­en qui lui per­mit de débreak­er et de re­venir à trois par­tout au second.

Le match fut égale­ment plaisant parce que Rafa jouait très bien, ser­vait très bien, bien mieux que lors de tous ses matchs précédents, et que, puis­qu’il jouait con­tre un autre gauch­er, in­sis­tait avec quel­ques slices co­urts croisés sur le côté droit, celui du re­v­ers ad­verse, plutôt que du côté gauc­he ou il pilon­ne habituel­le­ment avec son coup droit. Au final, be­aucoup de varia­tions, d’amort­ies, de slices, de volées et de points gag­nants avec un résul­tat prévisib­le puis­que si le chan­ge­ment de tac­tique de Melz­er avait agrémenté le spec­tacle, le résul­tat de­meurait le même : au bout d’une heure tren­te trois seule­ment, le tab­leau af­fichait 6-2 6-3 5-3 et 0-30 sur le ser­vice de l’Aut­richi­en.

Les pensées de l’Es­pagnol se tournèrent alors cer­taine­ment vers la fin­ale puis­qu’il fit deux fautes assez gros­sières. Re­venu à égalité, Melz­er passa deux aces pour sauv­er son ser­vice et laiss­er Rafa con­clure. Une fois n’est pas co­utume, ce de­rni­er ne fit aucun ef­fort sérieux pour se con­centr­er, en­tama le jeu par un coup droit qui sor­tit de deux bons mètres, puis par une autre faute di­rec­te, puis par une troisiè­me, pro­voquée par Melz­er celle là. A 0-40, je m’at­tendais à ce que l’Es­pagnol retro­uve ses esprits et sauve ces trois bal­les de break mais ratant sa première balle, il gratifia alors le pub­lic d’une doub­le faute d’anthologie puis­que la balle frap­pa le sol avant de ter­min­er sa co­ur­se dans le bas du filet sous les applaudis­se­ments nour­ris du pub­lic qui avait envie d’un peu de rab… De fait, Melz­er fit en­suite un bon jeu de ser­vice, Rafa égale­ment et le match se décida donc sur un tie-break que ce de­rni­er re­mpor­ta, non sans avoir com­mis deux aut­res bour­des sur les deux pre­mi­ers points et que Melz­er ne sauve deux bal­les de match, dont le secon­de sur une amor­tie re­mar­qu­able.

Mis à part cette fin de match in­habituel­le de sa part, Rafa fut ex­cel­lent d’un bout à l’autre, sans forc­er, sans cherch­er à se battre sur tous les points, en maîtrisant son sujet face à un ad­versaire cer­tes notab­le­ment inférieur et qui avait du mal à contrôler le re­bond ad­verse pen­dant plus d’une heure. Il me sur­prit par sa soup­lesse et sa fluidité. Ma voisine, une dame assez âgée, était con­ten­te : avant le début de chaque jeu, elle dis­ait à voix basse dans un soupir que seuls ses voisins immédiats pouvaient en­tendre : « Allez Rafa..». Je la préférais de loin à mes aut­res voisins qui ne ces­saient de dis­cutaill­er en-dehors et sur­tout durant les échan­ges (avant que je n’y mette un terme) ou à l’imbécile qui ap­pelait sur son port­able une amie située de l‘autre côté du Centr­al et qui se levait en­suite pour faire de grands mouve­ments avec ses bras pour lui in­diqu­er où elle était. Mais le pire était per­son­nifié par ce gros blaireau, repu et con­tent de lui, qui ten­tait, mal­heureuse­ment avec un cer­tain succès, de déclench­er des « Pom… Pom… Pom… Pom… Pom… Pom… Pom… Olla ! » en se levant de sa loge et haran­guant le pub­lic, tel un tri­bun ; pitoy­able spec­tacle ou l’in­dividu s’ef­face pour ne laiss­er place qu’à la fus­ion d’une foule ab­rutie et béate de­vant sa pro­pre bêtise…

Et main­tenant, place à la fin­ale dont j’espère avant tout qu’elle sera de bonne qualité. Le début du match sera pro­bab­le­ment très im­por­tant. Que le Suédois gagne le pre­mi­er set et tous les es­poirs lui seront per­mis. Qu’il le perde et il aura le plus grand mal à de­sserr­er l’étau. Il démar­rera sans doute mieux que l’an passé et Rafa a vive­ment intérêt à répondre présent dès le pre­mi­er point.

Soderl­ing a tout à gagn­er et re­lative­ment peu à per­dre : il n’a pas l’âge de Fran­cesca Schiavone et aura sans doute d’aut­res op­por­tunités. Rafa lui, a be­aucoup à per­dre dans l’af­faire : s’il perd ce match, il perd non seule­ment une fin­ale du Grand chelem mais voit cer­taine­ment s’en­vol­er l’es­poir de battre un jour le re­cord de Borg. Mais sur­tout, c’en sera fini du mythe de l’in­vincibilité de Rafa sur terre. Battu au meil­leur des cinq sets deux fois par le même ad­versaire, son auto­rité vacil­lera. Il n’aura aucune ex­cuse et cette défaite ne pour­ra pas être con­sidérée comme un ac­cident que tous ont connu. L’ac­cident a déjà eu lieu l’année dernière… D’aut­res Soderl­ing viendront…

Rafa a déclaré qu’il préférait jouer au sol­eil et que son lift gic­lait plus, ce qui est exact. Ce ne sera pas de trop con­tre Soderl­ing dont la pro­pens­ion à en­voy­er des re­v­ers décroisés dans le filet croit avec la hauteur à laquel­le il prend la balle. La météo s’an­nonce orageuse…

Je souhaite la vic­toire de Rafa qui est un bien meil­leur joueur que Soderl­ing. Je crains qu’une vic­toire de ce de­rni­er, sur­venant peu après celle de del Potro à l’US Open, con­du­ise à la généralisa­tion de ce j’ai du mal à qualifi­er de « style » de jeu, c’est-à-dire du primat ex­clusif de la force brute, sans aucune tech­nique, ni tac­tique, ni varia­tion, ni volée, ni amor­tie, ni lob, ni slice, ni fin­es­se. Del Potro, Be­rdych et Soderl­ing, suc­ces­seurs d’Ivan Lendl, ne méritent pas d’être copiés : ils méritent d’être bat­tus. Je fais con­fian­ce à Nadal pour être la hauteur de l’enjeu. Tous mes vœux l’ac­compag­nent dans cette fin­ale.

Pro­nos­tic : Raphaël Nadal re­mpor­tera un cin­quiè­me Roland-Garros cette après-midi, en trois, quat­re ou cinq sets selon le niveau qui sera celui de Soderl­ing…

About

Né l'année ou Rod Laver réalise son pre­mi­er grand chelem, suit le cir­cuit de­puis 1974, abuse par­fois de statis­tiques, af­fiche rare­ment ses préfér­ences per­son­nelles, aime les fos­siles et a par­fois la dent un peu dure...

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399 Responses to En avant Roland, jour 15

  1. Antoine 7 juin 2010 at 11:15

    Cela fait vendre du papier apparemment cher Franck..Cela étant les américains utilisent (ou plutôt utilisaient) depuis longtemps l’expression « old world slam » pour désigner un joueur qui remporte à la fois Monte Carlo, Rome et Roland Garros qui étaient les tournois les plus importants e la saison européenne sur terre…..

    @ULYSSE: AU FAIT? ON PEUT CHANGER LES POULAINS DE NOS ECURIES JUSQU’A QUAND ? RAPPEL DES REGLES POUR TOUS STP !

  2. Franck-V 7 juin 2010 at 11:29

    Proposition de « nouveau chelem » après les couleurs rouge, verte, bleue.

    Chelem Français: RG + Bercy (on va éviter Lyon, Marseille, etc…)
    Chelem Londonien: Queen’s+Wimbledon+O2 (tant que la Masters Cup a lieu à Londres, hein)
    Chelem Asie-Pacifique: AO+ Shanghaï, Tokyo, Pékin
    Chelem Sud Européen : MC-Rome-Madrid-Barcelone-Valence.
    Chelem nord Américain mais plutôt au Nord et fin d’été: Canada, Us Open, Cinci.
    Chelem nord Américain mais plutôt au Sud et début de printemps: IW, Miami, Mexico .
    Chelem du pétrole: Dubaï, Doha (plus une exhib à Abu Dhabi)
    Chelem multicontinental: Sydney, Rio, Memphis, Hambourg, Johannesbourg et Pékin.

    Prochain épisode, le chelem des sponsors par catégories: téléphonie, banque, voitures etc…

    • Jean 7 juin 2010 at 11:34

      Et le Ritchie Chelem (Bordeaux + Nice), c’est du pâté ?

      • Franck-V 7 juin 2010 at 12:26

        Pas encore homologué. Du moins par Olivier Rochus… qui demande d’y intégrer Belgrade et Casa.

  3. joseph 7 juin 2010 at 14:26

    Voila, on va enfin pouvoir passer à autre chose… le calvaire terre battue de cette année est bien fini et un constat s’impose à moi, vivement que de nouveaux joueurs arrive avec de nouveaux jeux… À part gulbis (euhh…. j’aurais presque envie de nommer Gasquet mais je le nomme pas) tout le reste me parait bien terne, sans génie et je dois bien reconnaitre que cela me transcende pas ou plus, me porte pas ou plus.
    Mais qu’est-ce que je dis là? il fut pourtant un temps ou je m’impatientais à l’approche de cette terre rouge, je trouvais qu’on y jouait le plus beau tennis, que c’était la surface de toutes les expressions possible (juste devant le dur), mais qu’a t-il bien pu se passer? Je sais que maintes théories ont été abordé ici: l’uniformisation, le matériel, les balles, les académies, Agassi, le professionnalisme, le clonage, le dopage et je ne sais quoi encore…Mais c’est plus fort que moi, je n’arrive toujours pas à comprendre.
    Une nouvelle saison commence, celle du vert, alors espérons que cela apportera à certain, dont je fais parti, un bol d’air frais, du jeu et……du jeu.

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