Dans la légende

By  | 8 juin 2009 | Filed under: Regards

Roger Federer et Andre Agassi, Roland-Garros 2009 (photo DR)De son pre­mi­er titre du Grand Chelem, décroché à Wimbledon, Andre Agas­si dit : « C’était tel­le­ment beau que je pouvais arrêter de jouer au ten­nis. » A pro­pos de son tri­omphe à Roland-Garros, sept ans plus tard, il lâche au contra­ire : « C’était tel­le­ment beau que je pouvais con­tinu­er à jouer au ten­nis. »

Roger Feder­er peut main­tenant saisir toutes les nuan­ces sous-entendues par les paroles de l’Américain. D’ail­leurs, quoi de plus norm­al fin­ale­ment que ce soit Andre qui re­met­te la Coupe des Mous­quetaires à celui qui le re­joint aujourd’hui dans le club très fermé des vain­queurs des quat­re tour­nois du Grand Chelem ? Entre deux hom­mes qui s’es­ti­ment et se sont souvent affrontés en tant que joueurs, la joie et l’émo­tion étaient palp­ables ce di­manche…

On ne pour­ra évidem­ment que re­mar­qu­er ce que leurs par­cours ont pu avoir de similaires, à dix ans d’in­terval­le. Pour l’Américain comme pour le Suis­se, on n’y croyait plus trop. Trop d’oc­cas­ions envolées par le passé. D’autant que l’un comme l’autre avaient été loin d’impres­sionn­er lors de leurs pre­mi­ers matchs. Pour­tant, tour après tour, ils ont franchi les ob­stac­les. Laborieuse­ment. Pour Feder­er, jamais même on ne l’avait autant vu à la peine en Grand Chelem : on lui re­proc­hait auparavant de ne gagn­er que sur son seul talent ? Il aura prouvé que, quand son ten­nis est en berne, il sait se sor­tir les tri­pes.

Cette semaine, le plus dur fut peut-être fait quand il survécut aux Trois glorieuses de la Porte d’Auteuil. Trois journées com­plète­ment fol­les : alors que Novak Djokovic puis Rafael Nadal dis­parais­saient à la sur­pr­ise générale, Roger Feder­er s’en sor­tait de just­es­se face à Tommy Haas. Fallait-il y voir un signe ? En tout cas, la route vers la fin­ale s’ouv­rait : Gaël Mon­fils maîtrisé en douceur, Juan Mar­tin Del Potro de­venu soudain trop tendre à l’en­tame du cin­quiè­me set, le Suis­se n’avait plus qu’à battre le tom­beur de Rafael Nadal : Robin Soderl­ing.

Gour­mand et gour­met conviés à la table

Chose qu’il s’ac­harna à faire comme à ses plus be­lles heures, le maître récitant une leçon qu’il af­fection­ne : pre­ndre d’entrée son ad­versaire à la gorge, lui col­l­er un set dans la vue en 23 minutes, et toujours mettre la pre­ss­ion en étant in­tran­sigeant sur sa pro­pre mise en jeu. Pour cela, une arme fatale chez ce Federer-là : le ser­vice. Seize aces, autant de ser­vices gag­nants, et une faculté retro­uv­ée à serr­er le jeu dans les moments-clés. A titre d’exem­ple, le tie-break du second set ne fut pas sans évoqu­er cer­tains numéros de sol­is­te ef­fectués par le Suis­se con­tre Lleyton Hewitt (US Open 2004) ou con­tre un cer­tain… André Agas­si (US Open 2005). Quat­re aces sur ses quat­re points de ser­vice, et quel­ques éclairs sor­tis de sa raquet­te en re­lan­ce. Le plus dur était fait.

Le bras trembla pour­tant au mo­ment de con­clure. Un peu. Mirka priait, les spec­tateurs avaient le doigt crispé sur leurs ap­pareils photos et Feder­er ser­vait pour le match, déjà prêt à pleur­er. Quand le re­tour de Soderl­ing échoua dans le filet, il tomba à genoux et lais­sa les lar­mes co­ul­er. Puis, de­vant les micro­s des jour­nalis­tes, il ex­pliqua que, après cette vic­toire, il pouvait main­tenant « re­com­menc­er à jouer au ten­nis sans pre­ss­ion ».

Et en effet, qu’a-t-il en­core à pro­uv­er ? Avec ce titre parisi­en, il égale le nombre de vic­toires en Grand Chelem de Pete Sampras, y ad­joig­nant la di­ver­sité du pal­marès d’Andre Agas­si. Le gour­mand et le gour­met se trouvent ainsi réunis dans la raquet­te du Suis­se. Ses de­van­ci­ers (Sampras, Agas­si, McEn­roe, Be­ck­er) l’ont tous adoubé de­puis longtemps comme le meil­leur d’entre eux. Ob­jec­tive­ment, quel joueur de l’époque moder­ne peut en­core lui con­test­er ce titre ?

Alors main­tenant, Roger Feder­er, qui s’était sans doute trop égaré dans sa quête aux re­cords de­puis 2007, va pouvoir retro­uv­er le sim­ple plaisir de jouer. Et là, à l’image de la dernière par­tie de carrière d’Andre Agas­si, s’il met de côté la pre­ss­ion pour ne con­serv­er que l’am­bi­tion, il n’en sera que plus re­dout­able…

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67 Responses to Dans la légende

  1. Alexis 9 juin 2009 at 22:01

    Bon OK. C’est vrai qu’on risque à tout momoent la redondance.

  2. Alexis 9 juin 2009 at 22:01

    moment

  3. Pierre 9 juin 2009 at 22:11

    Exactement, c’est comme si on avait du mal à reprendre son souffle après cette quinzaine totalement folle. Perso, je suis juste très content, avec l’impression que les choses reprennent leur place « naturelle ». Du coup, je reste sans voix. Tout ça va méchamment rebondir dans quelques temps, sur le gazon londonien…

  4. Lord Mad 9 juin 2009 at 23:01

    Salut la compagnie!!!! Petit post d’encouragement pour votre super idée de site, spécial thanks to Guillaume et Karim, les deux monstres sacrés du tennis d’antan…Bon outre la victoire de Roger qui me satisfait c’est pour l’être humain que je suis heureux, un chic type et son attitude exemplaire lors des JO de Pékin m’avait bluffé…A bientôt pour manger de l’herbe!

    • karim 9 juin 2009 at 23:07

      Lord Mad… Martigan? Jure!!!

      • Lord Mad 9 juin 2009 at 23:11

        Le seul, l’unique : Lord Mad himself!!!!lol Maître Yoda…

        • karim 9 juin 2009 at 23:13

          Alors si ça c’est pas une putain d’apparition qui va reléguer le fameux retour de Jésus attendu depuis 2000 ans au rang d’événement de foire ou d’happening à la fête de l’huma!!!!!! Huuuuuge, énorme!!!!

          • Lord Mad 9 juin 2009 at 23:21

            MDR Karim toujours aussi lyrique!!! çà fait plaisir de te retrouver!!!

  5. karim 9 juin 2009 at 23:12

    Y’a un barge (français pour l’anecdote) qui a battu le record du monde en apnée statique, il est resté 11’35″ ou quelque chose comme ça. Il s’est entraîné six mois à raison de 30hrs par semaine et mettra… deux mois à récupérer de sa perf!!! Frazier a passé deux semaines à l’hosto après sa première victoire comme Ali. Je me demande si on sait vraiment nous les terriens à quel point ces sportifs sont dédiés à leur performance. Plus que l’exploit physique, je pense que c’est le mental qui nous sépare simples mortels des champions.

    Je ne sais pas ce que vous en pensez mais finalement pour moi le flop de l’année so far c’est Verdasco. Il n’a tenu aucune des promesses placées en lui. Il continue à se liquéfier contre les meilleurs. Se pourrait-il que son 1/4 contre Nadal reste à jamais le sommet de sa carrière? J’espère que non. Il a battu Murray en Australie mais pour moi la murène n’est pas encore l’alpha et l’omega en GC, loin s’en faut.

  6. Lord Mad 9 juin 2009 at 23:23

    Dans le genre flop : Gilles Simon est pas mal aussi, à foirer chaque match important…

    • patrice 9 juin 2009 at 23:51

      Gilles Simon est clairement surcoté avec un jeu qui est maintenant connu et dont les déficiences techniques apparaissent cruellement cette année, même son intelligence est indéniable. C’est un top/flop

  7. patrice 9 juin 2009 at 23:53

    on est tous sous le choc c’est tellement bon une victoire de Fed, c’est un silence de ferveur, comment dire ? les mots sont insuffisants !

  8. Franck-V 10 juin 2009 at 01:08
  9. martin 10 juin 2009 at 15:00

    Excellente la video de Fed avec ses trophées !!! Malgré tout, je l’ai vue sans le son… Mais les images parlent d’elles-mêmes.
    Celle de Roddick, je l’avais déjà vue… Et puis si on compare les palmarès des deux joueurs, la video de Roddick a tout de même moins de saveur… Si Roddik doit être assomé avec UNE coupe, alors Fed est déjà mort, le crane atomisé, la cervelle en bouille totale !!!

    CF quand Al Capone (Robert de Niro) explose la tête d’un de ses traitres à la batte de base ball, dans Les Inccoruptibles, de De Palma…

  10. Julie 12 juin 2009 at 19:33

    Qu’est ce qui pourrait encore motiver Federer à jouer au-dela des 15…?

    Peut-etre dépasser le record de semaines totales comme numero un…? Mais je crois que ce qui le motive vraiment, ce sont les grands chelems. Donc… le grand chelem, la meme année? SI il voit ce challenge comme possible c’est vraiment ca qui le motiverait et qui lui reste, si il gagne Wimbledon motive par cette victoire plus lenvie de reconquerir son titre, derriere l’US Open ou il peut faire le record des 6 fois de suite + empecher Nadal de faire le grand chelem a son tour. Dans ce cas la, il aurait encore un autre petit chelem et le grand chelem l’annee suivante, meme si terriblement difficile, serait un defi de nature à le mettre en appétit…?

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