Cette question a été posée par un 15lover à l’issue du dernier Wimbledon et du 17e titre du Grand chelem remporté par Roger Federer. Voici la réponse que je propose.
Pour les grands anciens dont l’essentiel de la carrière a eu lieu avant les années 1960, le circuit était trop différent pour pouvoir établir un décompte comparatif. Les grands tournois pros n’étaient pas organisés toutes les années et les tournées professionnelles étaient tout aussi importantes, sinon plus. Le fait que Tilden et Gonzales ne comptent donc chacun que 13 titres majeurs maximum n’est pas significatif, sans même parler d’Ellsworth Vines avec seulement 6 grands titres alors qu’il a écrasé pendant 5 ans le circuit pro, Donald Budge avec seulement 10 grands titres alors que lui-même a dominé le circuit pendant 4 ans avant d’interrompre sa carrière pour s’engager comme soldat durant la Seconde guerre mondiale, ou encore Jack Kramer, seulement 5 grands titres.
En revanche on peut se risquer à comparer les champions actuels aux deux géants de l’ère pré-Open qui ont aussi continué à être au sommet au début de l’ère Open : Ken Rosewall et Rod Laver. Rosewall est passé professionnel en 1957 à une époque où les grands tournois pros étaient tout juste structurés (contrairement à celle de Gonzalez où une bonne partie des grands tournois pros n’étaient pas organisés tous les ans et où les tournées professionnelles étaient encore un des événements majeurs du tennis). Laver, lui, est passé pro en 1963.
Dans l’ère Open, Rosewall et Laver sont restés au top jusqu’en 1974 inclus, Rosewall disputant encore deux finales de Grand chelem en 1974, année de ses 40 ans, et Laver étant encore classé dans les 4 premiers mondiaux cette même année 1974 où il allait fêter ses 36 ans.
S’agissant des joueurs à compter des années 1980, quand le circuit a vraiment commencé à se structurer tel qu’on le connaît aujourd’hui, sont décomptés comme titre majeur tous les tournois du Grand chelem, ainsi que le Masters, désormais appelé ATP World Tour Finals (ce tournoi étant le seul où, pour l’emporter, on doit affronter 5 des 10 meilleurs joueurs du monde, ce qui ne peut jamais arriver dans un tournoi du Grand chelem où en en rencontre le plus souvent que 3 et, par construction, au grand maximum 4). J’ai jugé nécessaire d’appliquer aussi aux grands champions des années 1970 et du début des années 1980 un coefficient correcteur pour compenser leurs non-participations à l’Open d’Australie qui était alors un tournoi de seconde catégorie.
Voici donc, dans l’ordre croissant, le classement des plus grands champions en termes de titres majeurs parmi ceux qui ont commencé leur carrière professionnelle depuis la fin des années 1950… soit mieux que la seule ère Open : le champion ayant le plus prestigieux palmarès en titres majeurs des … 55 dernières années !
Sans attendre, un indice sur le winner : son identité comporte un « Ro… ».
Classement formel
- 9 titres majeurs = Connors (8 titres du Grand chelem, 1 Masters et 1 finale du WCT à une époque où le Masters du Madison Square Garden avait probablement supplanté les finales WCT comme tournoi majeur), Becker (6 titres du Grand chelem et 3 Masters) et Agassi (8 titres du Grand chelem et 1 Masters).
Mais Connors mérite bien qu’on lui applique une forme de prorata pour compenser ses non-participations à l’Open d’Australie après 1975. On peut tenter, pour rendre les choses comparables, de lui appliquer un coefficient correcteur et estimer que Connors « vaut bien » 12 titres majeurs s’il avait conduit sa carrière dans les tournois du Grand chelem comme les champions ayant commencé leur carrière dans les années 1980 ou ultérieurement.
- 10 titres majeurs = McEnroe (7 titres du Grand chelem et 3 Masters)
Mais l’Américain mérite bien qu’on lui applique une forme de prorata pour compenser ses non-participations à l’Open d’Australie à l’époque où il était le roi du service-volée (seulement 2 participations entre 1978 et 1985). Pour rendre pleinement opérantes les comparaisons avec les champions contemporains, ce coefficient correcteur me conduit à estimer que McEnroe aurait eu 2 ou 3 titres supplémentaires sur le gazon australien et porter son total de titres majeurs à 12 ou 13 s’il avait conduit sa carrière dans les tournois du Grand chelem comme les champions ayant commencé leur carrière dans les années 80 ou ultérieurement.
- 11 titres majeurs = Nadal (11 titres du Grand chelem)
- 13 titres majeurs = Borg (11 titres du Grand chelem et 2 Masters) et Lendl (8 titres du Grand chelem et 5 Masters).
Mais comme Connors et McEnroe, Borg mérite le régime du coefficient correcteur vu qu’il n’a participé qu’une fois à l’Open d’Australie (en 1974). Et vues les performances de Wilander sur le gazon plus lent de Kooyong, on peut bien estimer que Borg en aurait eu 3 ou 4 s’il avait participé du temps de sa gloire, ce qui porterait à 16 ou 17 titres majeurs le palmarès de Borg s’il avait conduit sa carrière dans les tournois du Grand chelem comme les champions ayant commencé leur carrière dans les années 80 ou ultérieurement.
- Entre 15 et 21 (11 titres du Grand chelem et 10 grands tournois pros avant 1968), le nombre de 15 titres majeurs paraissant le plus juste = Laver.
En effet, Laver, comme Rosewall, souffre du problème des titres amateurs et de la transformation du circuit. Laver a gagné 11 titres du Grands chelems et 10 grands tournois pros. En en retranchant les tournois du Grand chelem gagnés en amateur), on arriverait donc à 15 titres majeurs.
- 19 titres majeurs = Sampras (14 titres du Grand chelem et 5 Masters).
- Entre 21 et 25 titres majeurs, le nombre de 21 paraissant le plus juste : Rosewall (8 titres du Grand chelem dont 4 amateurs, 15 grands tournois pros avant 1968, 2 finales Dallas/Houston WCT). J’arrive à 22 titres en retranchant les 4 titres amateurs de Rosewall.
- 23 titres majeurs = Federer (17 titres du Grand chelem et 6 Masters).
Classement après correctif lié à l’open d’Australie :
Pour récapituler le classement que je propose après les correctifs qu’il me paraît juste d’apporter à Connors, Borg et McEnroe à cause du problème de l’open d’Australie, je propose au final le décompte suivant :
9 titres majeurs = Becker et Agassi.
11 titres majeurs = Nadal
12 titres majeurs = Connors
12 ou 13 titres majeurs = McEnroe
13 titres majeurs = Lendl
15 titres majeurs = Laver
16 ou 17 titres majeurs = Borg
19 titres majeurs = Sampras
21 titres majeurs = Rosewall
23 titres majeurs = Federer
Vous croyiez être arrivé au bout de l’exercice ? Erreur, car enfin, dernière hypothèque sur ce classement, on ne rend pas justice à Rosewall et Laver de n’avoir commencé leur carrière pro aussi tôt que leurs glorieux cadets. Rosewall est passé pro à 22 ans et Laver à 24 ans. Rosewall mérite donc bien qu’on lui ajoute 2 titres majeurs supplémentaires et Laver 4 de plus.
Ce qui nous donne au final du final :
9 titres majeurs = Becker et Agassi
11 titres majeurs = Nadal
12 titres majeurs = Connors
12 ou 13 titres majeurs = McEnroe
13 titres majeurs = Lendl
15 titres majeurs = Laver
16 ou 17 titres majeurs = Borg
19 titres majeurs = Sampras
23 titres majeurs = Rosewall et Federer
Autrement dit, Roger n’est que le co-GOAT des 55 dernières années. Il lui faut encore remporter 1 titre majeur pour supplanter Rosewall et ne plus être confronté qu’à l’énigme insoluble de la comparaison avec le dinosaure Tilden, le premier des géants de l’Histoire du tennis, celui pour lequel a même été créé le concept de GOAT.
Quelque chose me dit que Bill Tilden est l’alpha et que Roger Federer sera l’oméga.
Tags: Statistiques
Et à Ulysse sur mon post sur les GC à durée limité en 2028 bravo pour ta réponse des SMS.
C’est tout à fait cela.
Et aussi sur les JO
D’accord avec je sais plus qui, oui à n’importe quel sport au J.O si les meilleurs du dit sport sont présent.
Et pour une fois d’accord avec Coach, il ne faudrait même pas donner de point, à personne, sur le tournoi de tennis.
Aujourd’hui plus que hier une médaille d’or olympique (au dela des retombés en affaire) reste dans l’histoire, dans votre histoire.
Je dirai même plus c’est en ne donnant aucun point que l’on aurait renforcé la valeur d’une médaille d’or.
Totalement en phase avec ta dernière phrase.
Principalement à Elmar
Pas dur pour Nadal d’avoir le 3ème palmarès hors TB des joueurs en activité vu qu’il n’y a que 3 joueurs en activité qui remportent les tournois qui comptent.
Cela devrait quand même être pris en compte quand on parle de palmarès aujourd’ui.
Excercice pour les matheux
Depuis 2004 combien de GC hors les 3 meilleurs
Depuis 2004 combien de Master 1000 hors les …
Depuis 204 combien de Master cup hors les 3 … Nadal et Djoko cassent la moyenne d’ailleurs. Renvoyé.
Je suggère à tous de bosser la différence entre une cause, facteur et conséquence.
Vous avez 2 jours.
Copie à rendre sans utilisation abusive de wikipedia lol
« je préfère une personne qui donne tout pendant une période puis qui est cuite après plutôt qu’un mec qui est toujours au top du début à la fin » dixit kevinovitch
Ma réponse ne portera pas sur le dopage mais sur quelques points passés sous silence par Kevinovitch.
Le joueur qui dispute 97 matchs ne réalise pas un record. Antérieurement les meilleurs joueurs de simple disputaient plus de matchs de doubles – ex McEnroe -
Le mec qui est au top du début à la fin se ménage des plages de repos conséquentes durant la saison: Février – juillet – décembre
Le mec qui est au top du début à la fin de l’année termine ses rencontres beaucoup plus vite, met moins d’impact physique (meilleur rendement kWatt/point joué) et avait 24 ans à l’époque.