Magnus Norman, un Suédois très discret

By  | 6 juin 2009 | Filed under: Légendes

Magnus Norman, Roland-Garros 2000 (photo DR)Mag­nus Nor­man a été mon pre­mi­er coup de cœur ten­nistique. Cela a duré au moins une demi-heure, le temps d’un quat­rième set de folie en fin­ale de Roland-Garros.

Après un début de match décousu, où les deux ad­versaires ont al­terné le bon et le très mauvais, sur­tout côté suédois, la quat­rième man­che a su co­up­er la re­spira­tion du pro­fane spor­tif que j’étais alors. Je me souviens du com­men­tateur télé annonçant « Première balle de match pour Gus­tavo Kuert­en ». Une demi-heure plus tard, l’on jouait toujours. Mag­nus Nor­man avait sauvé dix bal­les de match, la plupart grâce à ce coup droit venu d’ail­leurs qui était sa mar­que de fab­rique (et de quelques-uns de ses com­pat­riotes). Kuert­en vacil­lait. Lors d’un tie-break de haute in­ten­sité, l’on com­prenait que le match se jouait main­tenant.

La onzième balle de match fut la bonne. Mag­nus Nor­man ne gag­nerait jamais Roland-Garros. Dès l’année suivan­te, des problèmes récur­rents à la han­che mettraient sa carrière en poin­tillés. Ir­onie de l’his­toire, son tom­beur en fin­ale de Roland-Garros sub­irait ex­ac­te­ment le même sort peu de temps après.

Pour­tant, Nor­man, ce météore déjà tombé dans l’oubli, moins d’une décen­nie après ses faits d’armes, n’aurait pas fait tâche au pal­marès de la Porte d’Auteuil, puis­qu’il se pose tout simple­ment comme le meil­leur ter­ri­en pro­duit par la Suède de­puis Mats Wiland­er. Gros ser­vice, sol­ide re­v­ers à deux mains et sur­tout gran­de claque de coup droit foud­royan­te com­posent un ar­sen­al par­ticuliè­re­ment ex­plosif que l’on va découv­rir à l’oc­cas­ion de Roland-Garros. Nous som­mes en 1997, un cer­tain Gus­tavo Kuert­en s’apprête à boulevers­er la hié­rarchie mon­diale, et le jeune Mag­nus Nor­man, 21 ans, lui file un bon coup de main en éli­minant rien moins que le n°1 mon­di­al Pete Sampras. Il s’arrête en­suite en quarts de fin­ale, mais on a la cer­titude que l’on re­ver­ra ce gaillard-là à la fête du côté de la Porte d’Auteuil.

On le re­ver­ra, oui, mais la ques­tion qui se pose est : quand ? Car Nor­man est un joueur tout ce qu’il y a d’irréguli­er. Cap­able de « coups » oc­casion­nels, il tarde à acquérir la con­stan­ce néces­saire pour franchir le de­rni­er pali­er. Pour­tant, à son rythme, pour le moins lent, il se rapproc­he. Apprend à bien jouer sur toutes les sur­faces : il gagne ses pre­mi­ers tour­nois sur dur, Long Is­land et Shanghai, et frap­pe même un grand coup du côté de Wimbledon, éli­minant 15 jeux à 13 au cin­quiè­me set la ter­reur Croate Goran Ivanisevic.

Tout est main­tenant prêt pour l’explos­ion de Mag­nus Nor­man. L’an 2000 part sur les chapeaux de roues : demi-finale à Adélaïde, vic­toire à Auckland, et sur­tout demi-finale à l’Open d’Australie. Mag­nus Nor­man entre dans le Top 10 et s’an­nonce comme un épouvan­tail de la saison de terre bat­tue qui se pro­file. Alors que la hié­rarchie semble pour le moins fluc­tuan­te en cette fin de millénaire, entre légion his­panique (Moya, Cor­ret­ja, Fer­rero, Costa), ar­mada sud-américaine (Rios, Kuert­en, Meligeni), con­tin­gent slave (Safin, Kafel­nikov, Med­vedev), sans oub­li­er le tenant du titre André Agas­si, les spécialis­tes s’ac­cordent à re­con­naître que Mag­nus Nor­man peut mettre tout le monde d’ac­cord. Monte-Carlo, avec sa fin­ale baroque Pioline-Hrbaty, n’est pas pour re­nseign­er sur les for­ces en présence… Il faud­ra en­core at­tendre trois semaines pour que les choses soient décantées. Trois semaines pour que tout le monde com­pren­ne : Nor­man et Kuert­en sont au-dessus du lot. A Rome, c’est le Suédois qui l’em­porte, bat­tant le Brésili­en en fin­ale ; celui-ci prend sa re­vanche la semaine suivan­te à Ham­bourg, avant de re­mport­er le tour­noi.

Dès lors, on at­tend logique­ment la belle en fin­ale de Roland-Garros. Le hasard a bien fait les choses en plaçant les deux hom­mes dans des part­ies de tab­leau dif­féren­tes. Dans des styles très différents, ils vont mettre un point d’hon­neur à honor­er leur rendez-vous pro­grammé le second di­manche : là où Gus­tavo Kuert­en a ramé comme un galérien (cinq sets pour venir à bout de Kafel­nikov et de Fer­rero), Mag­nus Nor­man a déroulé, al­ig­nant des clients aussi re­dout­ables que Med­vedev ou Squil­lari sans sour­cill­er. Seul Marat Safin est par­venu à lui chip­er un set.

Sur l’état de forme, Nor­man part donc favori de cette fin­ale. Kuert­en, lui, a en crédit son ex­péri­ence d’une première fin­ale vic­torieuse. C’est cette donnée qui fait d’abord la différence : Nor­man, com­plète­ment em­prunté, cède les deux premières man­ches pre­sque sans com­battre (6/2;6/3). Kuert­en joue juste et semble n’avoir plus qu’à cueil­lir son deuxième sceptre parisi­en. Sauf que son ad­versaire se révolte. Com­m­ence à tent­er plus de choses, et sur­tout à tent­er juste. Le Suédois re­mpor­te le troisiè­me acte 6/2. Le match de­vient haletant : les deux hom­mes se tien­nent et por­tent le quat­rième set vers des som­mets d’in­tensité… La suite est con­nue : les dix bal­les de match sauvées, avant que la onzième n’offre la déliv­rance à Kuert­en. Dans la foulée, Mag­nus Nor­man viendra squatt­er un in­stant le second rang mon­di­al. Un court in­stant. Il n’a que 24 ans et déjà sa han­che crie grâce. A par­tir de la fin 2001, il de­vient un in­ter­mittent du ten­nis.

De Mag­nus Nor­man joueur, il ne reste aujourd’hui plus grand-chose. Broyé par les bles­sures, l’homme a mis un terme à sa carrière en 2003. La dernière fois que le féru de ten­nis que je suis en­tretemps de­venu a en­ten­du parl­er de lui, c’était peu de temps avant sa re­traite. Il ef­fectuait une re­montée fan­tastique du côté de Monte-Carlo : mené 6/1 5/2 par ce Kuert­en qui re­stera décidément son alter ego, il s’im­posait fin­ale­ment 1/6 7/5 6/2, re­tour­ne­ment de situa­tion haute­ment in­at­tendu. Champ du cygne du champ­ion.

Magnus Norman entraîneur (photo Benoît)Neuf ans après sa fin­ale homérique à Roland-Garros, Mag­nus Nor­man est de re­tour au pre­mi­er plan, cette fois dans la peau de l’entraîneur. Alors que le ten­nis Varègue vit sa pire traversée du désert de­puis les années 1960, il emmène un com­pat­riote en fin­ale Porte d’Auteuil. L’exploit est de tail­le : qui aurait cru, il y a deux semaines, que Robin Soderl­ing serait en posi­tion de gagn­er Roland-Garros ? Le nouvel entraîneur ex­plique es­sentiel­le­ment cette réus­site par la psyc­hologie, l’écoute d’un joueur connu pour son caractère com­plexe. Des pro­pos sim­ples, à l’image du per­son­nage. Et l’alchimie a prise : ce di­manche, Mag­nus Nor­man sera en quel­que sorte en lice pour gagn­er Roland-Garros par pro­cura­tion.

Pal­marès de Mag­nus Nor­man :

Bas­tad 1997. Amster­dam 1998. Or­lando, Stuttgart, Umag, Long Is­land, Shanghai 1999. Auckland, Rome, Bas­tad, Long Is­land, Shanghai 2000.

Fin­alis­te de Roland-Garros en 2000. Demi-finaliste Open d’Australie 2000.

Vain­queur de la Coupe Davis en 1998.

N°2 mon­di­al en 2000.

About

Pre­nez ma nouvel­le ad­resse : http://livre.fnac.com/a7085832/Marc-Gdalia-Les-monuments-du-tennis-moderne

Tags:

145 Responses to Magnus Norman, un Suédois très discret

  1. emmanuel 7 juin 2009 at 15:58

    il joue un peu moins bien mais il tient encore

  2. Franck-V 7 juin 2009 at 16:00

    Attention au 2° attentat….

    • emmanuel 7 juin 2009 at 16:01

      parle pas de malheur

  3. emmanuel 7 juin 2009 at 16:01

    C’était un drapeau du FC Barcelone

  4. Franck-V 7 juin 2009 at 16:03

    rythme bien cassé en tout cas, objectif réussi.

    • emmanuel 7 juin 2009 at 16:04

      oui mais ça tient encore

  5. emmanuel 7 juin 2009 at 16:05

    La mauvaise foi du site we love tennis !! «  » »Malgré une pluie fine mais régulière, le match n’est toujours pas interrompu. On se demande pourquoi ? Le temps que Federer breake ?… «  » »

  6. Franck-V 7 juin 2009 at 16:06

    oui on connait les lascars, laisse tomber, c’est récurrent.

    • emmanuel 7 juin 2009 at 16:07

      ok je connaissais pas trop

  7. emmanuel 7 juin 2009 at 16:08

    C’est le moment de breaker !

  8. Franck-V 7 juin 2009 at 16:09

    Rien n’aura été épargné à Fed sur ce RG

  9. emmanuel 7 juin 2009 at 16:10

    l’autre devient un peu plus solide

  10. Franck-V 7 juin 2009 at 16:10

    Oui et l’interruption menace.

    • emmanuel 7 juin 2009 at 16:11

      bénéfique à qui tu penses?

      • Franck-V 7 juin 2009 at 16:12

        devine…. c’est vase communicant.

        Fed a l’expérience mais c’est quand même pas un fait de jeu.

        Moi, ça me chahute encore.

  11. emmanuel 7 juin 2009 at 16:13

    espérons que ça va pas être arrêté

  12. emmanuel 7 juin 2009 at 16:13

    jeu blanc pour rétablir les choses

  13. emmanuel 7 juin 2009 at 16:16

    quel revers de Roger !

  14. emmanuel 7 juin 2009 at 16:19

    mégapassing !!

  15. karim 7 juin 2009 at 16:27

    Tie break de folie!! Il n’a servi que des aces!!!!!!

    • emmanuel 7 juin 2009 at 16:27

      je ne l’ai jamais vu aussi bien servir

  16. emmanuel 7 juin 2009 at 16:27

    Génial, le rêve se rapproche !!!

  17. karim 7 juin 2009 at 16:28

    Le tie break le plus abouti qu’il m’ait été donné de voir, depuis Lendl qui avait fait 7-0 et sept winners à McEnroe à Melbourne en 90 je crois.

    • emmanuel 7 juin 2009 at 16:28

      fantastique !!

  18. karim 7 juin 2009 at 16:28

    ça sent bon putain ça sent bon. S’il le breake d’entrée ça finit dans 18 minutes et 6/0 au troisième.

    • emmanuel 7 juin 2009 at 16:29

      A 17h10 c’est fini !

  19. benoit 7 juin 2009 at 16:30

    Karim j’ai aussi souvenir d’un 7-0 infligé à Hewitt au 2ème set de la 1/2 finale de l’US Open 2005 où Fed était dominé dans le 2ème set ! Il s’était transcandé comme aujourd’hui !

    • karim 7 juin 2009 at 16:31

      Lendl avait fait 7 full winners. C’est ce qui est plus impressionnant.

  20. karim 7 juin 2009 at 16:30

    Les amoureux des calculs, si Fed faisait le doublé RG-W et que Nadal était vraiment forfait, ça nous placerait où là?

  21. Franck-V 7 juin 2009 at 16:30

    Attention, Sod n’a plus rien à perdre, il va lâcher ses coups et faut pas que Fed se voit déjà à la remise de la coupe des Mousquetaires.

    Maintenant, c’est un fait qu’il n’a jamais été aussi bien placé.

    • emmanuel 7 juin 2009 at 16:32

      je ne vois pas robin gagner trois sets de suite

  22. emmanuel 7 juin 2009 at 16:31

    il serait sans doute de nouveau numéro 1

  23. karim 7 juin 2009 at 16:31

    Balle de break!!! Soderling a la tête dans le sac.

  24. karim 7 juin 2009 at 16:32

    Le sac est fermé c’est bon.

  25. emmanuel 7 juin 2009 at 16:32

    break !!!

  26. karim 7 juin 2009 at 16:34

    En tout cas sur ce tournoi il aura surtout retrouvé ce service, le meilleur du circuit. Il servait comme un junior depuis ses problèmes de dos, là sur ce tournoi on retrouve le meilleur serveur du circuit. Pas le plus puissant loin s’en faut, mais le meilleur.

    Superbe échange remporté par le suédois, revers croisé magistral.

    • emmanuel 7 juin 2009 at 16:35

      il va être inarrêtable à Wimbly avec un tel service et une confiance +++

  27. karim 7 juin 2009 at 16:36

    j’hallucine, je viens de recevoir le message d’erreur suivant:

    vous envoyez vos commentaires trop rapidement, calmez-vous!!

    • emmanuel 7 juin 2009 at 16:36

      mdr

      • Guillaume 7 juin 2009 at 17:56

        Mdr, tu m’apprends des choses sur les fonctionnalités du site !!!

  28. benoit 7 juin 2009 at 16:36

    La performance au service de Fed est assez ahurissante il doit tourner autour de 80% de 1ères balles !

    • emmanuel 7 juin 2009 at 16:36

      oui c’est un extraterrestre

  29. Franck-V 7 juin 2009 at 16:37

    Karim, j’ai lu ça :

    « Rafael Nadal avait 14960 points ATP avant Roland :
    Il perdra 2000 pts (sa victoire 2008) et gagnera 180 pts (1/8 2009) soit 13140 points lundi. En cas de retrait à Wimbledon, il perdrait 2000 pts, n’en marquerait aucun, soit 11140 pts au sortir du tournoi Londonien.
    Si federer qui a actuellement 10470 pts gagne Roland et Wimbledon (rien n’est moins sûr, je précise), il se verrait retrancher les (2*1200 pts deux finales de 2008) et créditer de 4000 pts, soit un total de 12070 points. Il redeviendrait n°1 mondial avec 930 pts d’avance. »

    • emmanuel 7 juin 2009 at 16:39

      Est ce que ça prend en compte les points qu’il va perdre à Queens ?

  30. emmanuel 7 juin 2009 at 16:38

    oh non pas la pluie, pas maintenant !

  31. Franck-V 7 juin 2009 at 16:43

    le Queen’s et Halle sont des MS 250 et ne change pas grand chose à ce calcul.

    • emmanuel 7 juin 2009 at 16:44

      c’est fou on est passé d’un moment où certains parlaient de grand chelem pour nadal à un Roger potentiel n°1

  32. emmanuel 7 juin 2009 at 16:48

    pas nelson non !!!

  33. emmanuel 7 juin 2009 at 16:51

    à 2 jeux du rêve

info login

pour le login activer sur votre profil la barre d'outils

Demande d’inscription

contactez-nous à : 15-lovetennis@orange.fr

Archives

Commentaires récents

Suivez nous sur Twitter

@15lovetennis