Nous roulons sur nos vélos, la raquette fixée au porte-bagages par un tendeur. Jérôme me dépasse et exulte : « Tu vas prendre une bulle, c’est promis ! Ah ah ! » Loin, bien loin dans ma mémoire, cette évidence est gravée : j’ai toujours aimé le tennis. Jouer au tennis. Ce jeu est si intimement, si solidement lié à mon enfance que le souvenir précis de notre rencontre m’échappe, comme un poisson glisse entre les mains.
1973. Mamers, petite ville de 6 000 âmes, logée au cœur de la Sarthe. J’y découvre le tennis à l’âge de six ans. Deux terres battues extérieures, deux quicks, voilà pour les jours où la pluie ne tombe pas. L’hiver, c’est dans une salle omnisport au parquet fusant et au marquage compliqué que je fais mes premières armes. Cours collectif. Monsieur Alexandre nous y apprend le jeu, moniteur à l’ancienne pour du tennis à l’ancienne : le coup droit comme le revers se jouent à plat. On slice également, on essaie le chop, on l’autorise même en coup droit, lors de périlleuses montées au filet. J’apprends donc à ne pas lifter malgré l’emprise grandissante de lifteurs nés sur le tennis mondial. Au diable Borg ou Vilas, Monsieur Alexandre est têtu, il nous intimera comme modèles les Nastase, Panatta et Laver. Quatre années seulement après le second Grand chelem de l’Australien, triomphe absolu d’un style gravé dans le marbre, pourquoi révolutionner les bases de cet apprentissage ? Une mutation est en cours et je ne prendrai jamais ce train là ; le tamis de ma raquette restera toujours perpendiculaire au sol au moment de l’impact et ma prise, dite marteau, ne se fermera jamais. Mécanique non évolutive qui recherche les trajectoires tendues.
Monsieur Alexandre avait la quarantaine et une épaisse moustache noire qui s’imposa à moi comme une autorité indiscutable : s’il riait, je jubilais et s’il se fâchait je me faisais nain. Ma relation inhibée au maître fit que j’avais le plus grand mal à lui exprimer, en termes intelligibles, la folle admiration que je nourrissais pour le jeune Bjorn Borg. De plus en plus rares, mes tentatives se limitèrent à un commentaire discret le lendemain d’une finale victorieuse à Roland-Garros ou Wimbledon. Je ne pouvais pas laisser éclater ma joie librement, il s’agissait juste de glisser un « Vous avez vu le match hier ? », de souligner que l’évènement avait eu lieu, qu’une révolution était en marche. Adepte du « beau jeu », il détestait ce nouveau monde. Élève soumis, chaque victoire de Borg me ramena un peu plus à ma prise marteau. Je crois savoir aujourd’hui ce qui me fascinait en lui : à mes yeux, il était invincible, super héros désigné. Les posters, les livres, la raquette Donnay, le polo Fila, tout était bon pour entretenir la flamme. Hélas, mon corps d’enfant grassouillet ne parvint jamais à la métamorphose espérée. En 1979, nous nous rendîmes à Roland-Garros et je vis jouer Borg. Il était opposé, sur le Central, à un Français, Gilles Moretton, qui reçut ce jour-là une fessée publique. Autour de moi les gens encourageaient le local mais de mon côté, au bord de l’hystérie, je donnais de la voix à chaque passing du grand blond avec des chaussures en pécari. Il remporta le tournoi sans trembler, battant en finale Victor Pecci, playboy cocaïné dont la carrière fut une étoile filante.
Les choses sont curieuses : j’ai conservé une image assez paisible de cette moustache autoritaire et je n‘aime plus Borg. Je sais m’être trompé d’idole. Mais j’ai gardé de ce conflit originel une prise désuète, trop ouverte. Le beau jeu, mon Moby Dick à moi…et les fautes directes, corollaire irritant.
J’ai le vague souvenir, peut-être faux, que personne, à part nous, ne jouait au tennis dans cette ville. C’était encore un sport bourgeois et, à Mamers, les courts étaient souvent déserts et les partenaires de mon âge manquaient cruellement. Alors nous jouions ensemble, Jérôme et moi. Je revois mon frère ainé, mon adversaire préféré, mon défi intime. Tous les jours, ou presque, nous enfourchions nos vélos pour aller taper ces balles blanches ou orange. Rarement jaunes. Mon frère m’humiliait souvent sur un court : plus grand, plus puissant, plus endurant, un peu plus de tout. Fréquemment, voire systématiquement, cela dégénérait. Un point litigieux et je te traite de con, tu me files une claque alors je te balance un coup de raquette dans le tibia. Tu me poursuis autour du filet et je finis par m’enfuir sur mon vélo en jurant de tout raconter à Maman. Au fond, cette joie piquante qui nous animait, celle de courir après une balle comme de jeunes chiens fous, nous étions maîtres dans l’art de la transformer en théâtre dramatique. Mais, chaque jour pourtant, nous y retournions, imaginant des duels épiques dans lesquels il serait Jimmy Connors et moi Bjorn Borg. Quand le résultat d’une finale d’un Grand chelem contrariait l’un de nous deux, ce qui était presque toujours le cas, nous allions en découdre et réécrire l’Histoire du tennis sur un quick sarthois. Nous décidions alors que le match irait au meilleur des cinq manches. Et nous le faisions : je progressais plus vite et parvenais à l’accrocher de plus en plus. De temps à autre, un public invisible se levait pour nous acclamer après un passing réussi. J’aimerais que ce passing eut été lifté mais, malgré mes tentatives clandestines, loin des regards inquisiteurs de Monsieur Alexandre, mon jeu demeurait plat comme la Belgique. Je perdais ces finales bis, non sans avoir braillé et déclenché quelque incident sur le court, mais savais au fond de moi que mon idole suédoise était destinée à écraser le monde.
Cette rivalité par champions interposés encombra nos vies durant quelques années, même loin des courts. La famille étant abonnée à Tennis magazine, si le poster central honorait Connors, mon frère l’emportait illico, triomphant. Et un matin, en 1976, il me jeta hors de mon lit en hurlant : « Cette fois on sait qui est le meilleur ! » Pendant la nuit, Connors venait de ratatiner mon blond lifteur en finale de l’US Open… et mon frère avait une radio dans sa chambre. Les années suivantes m’apporteraient mon lot de revanches.
Notre analyse du tennis mondial ne convergea que sur un point : McEnroe était celui qui allait nous les hacher menues. Quand je vois aujourd’hui jouer ces trois champions, je me répète que nous nous étions tous les deux dans le faux, aveuglés par notre micro-lutte. Mac était le plus talentueux et il nous faudrait des années pour nous l’avouer autour d’un verre.
En septembre 1979, nous étions loin de nous douter que cet US Open, dans notre mythologie personnelle, serait le dernier d’une série magnifique. McEnroe battit Gerulaitis, certes. Borg et Connors avaient perdu, certes. Mais, une semaine plus tard, nous perdions notre mère. Dans la foulée, nous quittâmes Mamers définitivement pour vivre dans une grande ville. Le chagrin et l’adolescence étouffèrent notre amour du tennis, pour de longues années, sous une chappe de béton urbain. McEnroe/rebelle aurait pu être une idole idéale lors de nos années grises. Trop tard. Le Clash, remède à la douleur, nous accompagna plus sûrement. J’avais douze ans et, en l’espace de deux mois, je passai de la campagne à la ville, du tennis au punk.
J’attendis d’avoir vingt-huit ans pour parcourir le chemin inverse, jouer à nouveau, inventer un autre lien avec cet amour d’enfance et redécouvrir les délices fragiles de la prise marteau. C’est une autre histoire.
Quelques dédicaces pour conclure :
Aux années qui suivirent cette histoire.
Tags: tranche de vie
Tiens, un article de Pierre ! Je me le garde pour ce soir
Bel article, écriture élegante,souvenirs touchants qui m’évoquent cette époque où la popularité du tennis a explosé.
J’ y suis venu un peu plus tard, en 1980 où le lycée avait mis à notre disposition deux courts… sans prof.C’est vrai que l’ achat mensuel de Tennis Magazine et du défunt Tennis de France ( ah les photos de Gilles de Kermadec qui décomposaient le service de Mc Enroe !) étaient un grand moment.
Une technique d’une autre époque effectivement , aujourd’hui l’ enseignement trop uniformisé forme des wagons de coup droits à prise très fermée, revers à deux mains liftés, et pourtant l’on observe toujours beaucoup de styles atypiques sur les courts municipaux, ceux qui n’ont pas eu la chance (?) d’avoir reçu des cours peut etre…
Superbe et emouvant.
Un bien bel article!
Magnifique Pierre, authentique et émouvant. La fin est si belle, on croirait l’épilogue d’un roman.
J’ai beaucoup de souvenirs communs avec les tiens, notamment cette admiration sans borne pour Borg, l’homme de glace que j’adorais voir laminer ses adversaires à Roland. Et j’avoue aussi en avoir voulu à Mac Enroe de l’avoir fait chuter à Wimbledon, ignorant que Mac allait devenir plus tard mon joueur favori.
Je pense que beaucoup d’enfants s’identifient à l’homme fort du moment et surtout au champion de Roland Garros, tournoi le plus médiatisé en France. Il se passe le même phénomène avec Nadal aujourd’hui.
Plus tard, parfois, on porte un autre regard sur le tennis que celui de l’admiration enfantine immédiate.
J’avoue que quand je regarde jouer Borg avec mon regard d’adulte, je me demande encore ce qui m’a tant fasciné chez lui. Son invincibilité sûrement, son aura aussi.
Bien beau texte en tous les cas.
C’est sobre, pudique, émouvant, sincère, c’est beau. Tu te livres davantage que les quelques uns parmi nous qui ont écrit des choses personnelles, c’est tout à ton honneur. bravo pour la démarche, pour le résultat. Un second opus sur la nouvelle génération avec la petite Louise?
Borg et Mc pour moi ce sont des souvenirs d’enfance, j’aimais déjà le tennis mais je ne le savais pas encore. Je regardais ces matches qui n’en finissaient pas sans rien comprendre au jeu, mais je restais scotché devant. je préférais Borg à tous les autres, juste pour son look. Il avait quelque chose.
Pour moi le tennis a vraiment commencé avec les duels Lendl vs Wilander, c’est là que j’ai vraiment accroché et commencé à jouer. c’était en 1986, j’avais 13 ans déjà, trop tard pour gagner Wimbledon.
Aujourd’hui c’est vrai que je suis tout ça d’un oeil plus distrait; j’aime toujours le tennis, mais dans mon coeur MON tennis à moi, celui des années Agassi vs Sampras, becker vs Edberg, brûle d’un flamme éternelle. Quand je m’y replonge c’est avec une délectation infinie.
Pierre c’est un très bel article que tu nous livres, merci pour ça.
Superbe, Pierre. Une belle histoire servi par une belle plume… Je suis rentré dans l’article tout de suite et je n’en suis ressorti que bien après la fin de ma lecture.
Contrairement à ceux qui ont posté avant moi, je n’ai pas connu cette époque du tennis. J’apprécie vraiment de la découvrir ici avec des textes de cette qualité. Je crois que j’aurai adoré Borg, grâce à ses records et son charisme, mais que je me serai tourné vers un tout autre style de jeu après sa retraite.
En tout cas, merci Pierre pour ce petit morceau de ta vie si bien raconté.
Merci pour vos réactions, c’est la première fois que j’écris un article sur le site et raconter cette portion de vie me chatouillait depuis un moment : je sais que vous êtes de bons lecteurs équipés d’un oeil bienveillant.
Pas de sensiblerie là-dedans, je pense à tout ça avec tendresse et amusement.
@ karim : quelques mots sur la Louisette, ça viendra peut-être. Pour l’heure, je vais la voir jouer…à 2 heures de route !!!!
Très bon article, Pierre: touchant et amusant à la fois, il me fait découvrir une époque que je n’ai jamais connu (trop jeune).
Merci, tout simplement
Pierre, ton témoignage est très poignant et on peut ressentir une certaine sensibilité sans la dramaturgie mais au fond cette nostalgie de l’enfance est saine, elle permet de se construire et je te remercie de la partager avec nous, ce n’est jamais simple de se livrer même à travers des écrans d’ordis.
Pour moi Borg c’était l’idole de mon grand frèr qui est de 68, moi je découvrirai vraiment le tennis et mon premier « idole » dont je tairais le nom quelques années plus tard…
Lendl?
J’étais désireux de ne laisser qu’un adjectif comme commentaire en hommage à ce somptueux article.
Mais je ne sais lequel choisir dans ma besace.
Magnifique? Beau? Emouvant? Superbe? Touchant? Grandiose? Nostalgique? Mélancolique?
Oui, tout ça à la fois.
Poétique.
Je ne sais pas comment c’est possible, mais vous parvenez à chaque fois à mettre la barre un peu plus haute. Je crois qu’on a atteint un summum cette fois.
Bravo; et merci Pierre.
C’est vrai qu’avec le recul, quand je repense à l’évolution de ma relation avec le tennis je suis un peu amusé par mon statut de posteur/auteur, qui regarde dix matches par an – et encore – dont la connaissance du jeu et de ses acteurs est de plus en plus théorique. La génération JMDP sera la dernière que j’arrive à intégrer je pense. Là déjà je n’entends parler que de Raonic depuis quelques jours, mais ma curiosité de voir ce qu’il est capable de faire raquette en main est aussi intense que celle de découvrir combien de prospectus publicitaires j’aurai dans ma boîte aux lettres en rentrant du tafe. Je m’en fous. Lire « énorme service et gros coup droit » me plonge dans la déprime parce que ce n’est que la énième déclinaison d’un joueur que j’ai déjà vu. Ce qui monte n’a pas l’air de porter en son sein d’authentiques artistes enthousiasmants ou charismatiques comme Nalbandian, Safin, Federer, Korda ou Rios. Rien de tout ça, que des bébés éprouvette avec une tête d’ogive nucléaire à la place du cerveau et des circuits imprimés à la place du cœur. Des gars qui pourraient enregistrer toutes leurs interviews avant la saison.
J’ai aimé le tennis; déjà je n’aime plus y jouer, la faute à des genoux peu coopératifs et un mode de vie qui ne s’y prête plus, notamment à cause la raréfaction des partenaires. J’ai foulé un seul terrain en onze ans. Quand j’étais ado, je passais des heures à regarder, soupeser, caresser ma raquette. C’était du fétichisme certainement. J’aimais particulièrement l’aspect mat des Prince graphite, cet aspect rêche mais suave dont la sensation au toucher était merveilleuse. Avec les raquettes vernies le plaisir était plus oculaire que sensoriel, je faisais jouer la lumière, ses reflets. Les cadres profilés me mettaient en émoi; j’allais dans les magasins juste pour les soupeser, les admirer. Plaisir auditif quand j’entendais le pshhhhhhhhhhh au dé-goupillage d’une boîte de Slazenger, et plaisir olfactif avec les effluves qui s’en échappaient. Mes balles préférées étaient les Tretorn, mais je n’en achetais jamais parce qu’elles venaient en conditionnement carton à pression ambiante, sans le pshhhhhhhhhhh donc à l’ouverture. Non.
Une balle neuve c’était beau, tellement beau. Je ne voulais pas qu’elles se salissent, je confesse avoir lavé des balles parfois. Une boîte de Wilson orange que mon père m’avait ramenée à l’époque où tout était jaune et pas joli. Je n’avais aucune idée quand j’ai débuté de ce qui se faisait ou pas industriellement; pour ma première commande à Roussev Sport (qui n’a pas lu Tennis Mag dans les années 80 ne peut pas comprendre) j’avais dit à mon père: des balles mais ni blanches, ni jaunes, ni oranges. Je pensais que les balles bleues ou rouges existaient. Il est rentré sans balles, mais avec le duo de polos d’Edberg et Lendl, Adidas cuvée 1987. A mon sens les deux tenues les plus belles dessinées pour un tennisman. Avec le recul je reste admiratif de celle du Suédois, pour Lendl c’est autre chose. A l’époque il était mon joueur favori, aujourd’hui…
Je reviendrai.
Ce que je trouve sublime sur ce site, c’est que les articles engendrent des commentaires de haute volée où chacun y va, avec réussite, de sa madeleine de Proust et de son expérience personnelle. C’est un des rares sites sinon le seul, du moins à ma connaissance, où les commentaires sont aussi intéressants que l’article.
Complètement d’accord avec toi ^^. Surtout quand on a l’habitude d’aller sur lequipe/tennis lol
En me connectant sur le site ce matin je me suis dit « chouette, un nouvel article, de Pierre qui plus est ! ». Quel allait-être le ton adopté ? Comique confinant parfois à l’absurde comme certains de ses posts, ou bien plus intimiste comme le suggère le titre ? Au final c’est une sorte de plongée dans une époque que je n’ai pas connu, et de loin, parlant de champion que je n’ai pu voir que sur des images de mauvaise qualité lors de visionnages éparses sur youtube. C’est très bien raconté, très fluide, un beau texte, qui appelle des commentaires de même qualité (celui de Karim est immense). Encore bravo.
Et sinon, Gulbis s’est coupé les cheveux.
On est donc conscrits mon cher Pierre, et je me reconnais dans plusieurs de tes souvenirs, même si je n’ai pas de frère aîné, et si j’étais plutôt Peter Gabriel que Clash.
Drôle de sensation que cette madeleine de Proust par auteur interposé. Merci!
Tiens, juste pour dire que même si Roddick se plante royalement aux MS1000 US (2 défaites au 1er tour), il serait encore environ 15ème mondial.
Kristian, du Roddick, t’as pas fini d’en bouffer.
Mouai.. enfin il vient de gagner l’ATP 500 le plus surcote au monde, vu qu’il n’a battu aucun joueur du top…50. Il a donc tenu son rang que je situe a peu pres a la place que tu viens de mentionner.
This is the end, my friend, this is the end…
Oui mais comme Roddick ne va pas se planter aux deux MS1000 US, il sera encore dans le top 10 dans un mois!
En regardant sur UTube la balle de match contre Rahanic, j’ai enfin compris pourquoi A-Rod porte toujours sa casquette: c’est à cause d’une calvitie naissante. Ou alors c’est l’inverse, il perd ses cheveux à force de toujours porter une casquette.
Beaucoup d’émotion dans ce – premier – texte, dont on sent qu’il tenait particulièrement à coeur à son auteur. La rivalité avec le grand frère, les cours avec un professeur de tennis qui décidément ne peut être que bourru, la première fois qu’on découvre « son » champion en vrai dans les gradins… jusqu’au drame familial qui souligne s’il était besoin la futilité de cette balle jaune, ou orange, ou blanche, et de la raquette qui l’accompagne. Du vécu, de l’émotion, pas de lyrisme excessif (pas de lyrisme tout court), tout ce que j’aime. Touché, Pierre.
Punk à 12 ans ? Ca vous forge une identité musicale ! Et excellent choix de dédicace que le White man in Hammersmith Palais, titre qui extirpe au bout d’à peine quelques mois la bande à Strummer des banals combos punk qui pullulent vers 76/78. Et puisque le temps passe vite, peu de temps après ça sera ça : http://www.youtube.com/watch?v=Ow_837swcfw&feature=related
Je ne sais pas si tu as continué par la suite à suivre les carrières solos des uns et des autres, mais Strummer a toujours conservé cette passion du reggae. Les deux derniers albums qu’il a sorti sont particulièrement réussis.
Bon, j’arrête là. Je repasserai parler tennis.
Et au passage, tu peux me dire si tu penses publier mon article avant Wimbledon 2043…
U’re the next…
il est très bon. un peu long mais très bon, j’ai beaucoup aimé. par contre après celui-ci ça reste un peu sur le même thème de l’expérience personnelle et tout. Est-ce que ça va pas le desservir de venir juste après une séance de catharsis déjà?
C’est ce qui m’embête un peu… Tu nous écris ton Top 5 du coup droit ?
Ok. livraison mercredi?
Mercredi ou jeudi, selon si Biquette fait exploser le compteur à commentaires cette semaine (vu le tableau de Dubaï ça m’étonnerait, m’enfin avec les FFF… :lol:)
COMPLOOOOOOOOOOOOOOOOOOOOT!!!!!
Je m’échauffe, ça va saigner.
Hum, ou comment rejeter aux calendes grecques mon article
Pour en revenir sur ton commentaire et l’absence de lyrisme: je crois que c’est précisément cette retenue, cette pudeur qui fait de ce papier un GRAND article, bourré d’émotions, même pour ceux qui n’auraient pas connu cette période.
On a tous notre madeleine; et celle de Pierre est su-perbe.
Merci à toi Elmar, tu sais dégainer un compliment : l’absence de lyrisme. J’ai espéré y arriver, ça semble pas trop mal engagé !
Nice text. C’est sur qu’en choisissant Borg dans le duel Borg – Connors, tu as du t’en prendre plein la gueule de la part de ton grand frere qui devait avoir l’esprit revanchard assez souvent.
Je viens de lire ton texte, je suis davant mes élèves qui sont en devoir et j’ai du mal à retenir mes larmes. Très beau texte, merci.
Mais non Oliv, vas-y pleure, laisse toi aller. Et perds leur respect à jamais!!!!!
Respect, c’est quoi ce mot ?
Ca file quand même un coup de vieux de se dire que j’écoutais à la radio (Radio Luxembourg à l’époque), un matin de septembre 62 -j’avais 15 ans- pour savoir si Laver avait gagné le tournoi de Forest Hills. Je n’avais jamais entendu parler de Grand chelem,mais comme je m’interessais au tennis comme à tous les sports, je voulais savoir si celui que mon frère ainé avait vu jouer à Paris (on ne disait même pas Roland Garros), avait aussi gagné aux Etats Unis.
Je n’avais bien sûr jamais touché une raquette de tennis, objet bien trop cher pour les moyens de mes parents et non plus jamais pénétré dans un club. J’étais à Lyon et je pensais, sans être loin de la vérité qu’il n’y avait que les enfants des riches soyeux qui pratiquaient ce sport.
Moi, je m’éclatais au rugby et je me mettrai au tennis à la fac quelques années plus tard et je joue toujours 40 ans plus tard.
Mais avec une vieille raquette de jokary et une balle en mousse, je rejouais depuis l’âge de 6/7 ans tous les matches des vedettes de l’époque dans ma cour contre un mur sur lequel j’avais tracé une ligne à la craie pour simuler le filet.
Merci Pierre, d’avoir ravivé ces souvenirs.
J’ai calculé. Tu es plus vieux que Line Renaud!!!
Je suis le père de Jeanne Calment
Montagne est tellement vieux qu’il a même écouté Zappy Max sur RTL, quand nous, les jeunots, n’avons découvert le ‘quitte ou double’ que sur RMC.
Oups… Pas « RTL », désolé, mais « Radio Luxembourg ». Pas taper!
Que j’écoutais sur un poste « à lampes » of course
J’aime cet article, surtout pour les sensations qu’il restitue. Le com’ de Karim va aussi dans ce sens. Difficile de savoir pourquoi on aime le tennis, mais au-delà de la dimension aficionados de ses stars, aimer le tennis, c’est appartenir à une internationale, qui ressent en vrac…
- le plaisir de faire le premier pas sur un court, connu, ou inconnu, le grain du quick;
- Le pschitt d’une boîte neuve, faire gaffe aux doigts,
- Le plaisir de mettre un grip neuf, le plus vite possible, genre, j’ai l’habitude;
- Le coté un peu hasardeux mais jamais dépassé de mettre une raquette à la verticale et l’autre posée dessus à l’horizontale pour évaluer la bonne hauteur du filet,
- La galère de stabiliser la p…de bande perpendiculaire au milieu du filet avec le crochet qui l’attache au sol;
- la nécessité de l’inspection du grillage, que les balles ne se tirent pas par en dessous;
Etc, etc.
- Jouer deux sets, gagnés ou perdus, et proposer un troisième en se disant que pour celui là, de la -presque- fausse, on va jouer différemment, essayer des trucs, tout lâcher puisque ça compte pas;
- Avoir treize ans et jouer 9 sets dans l’après-midi;
- La question existentielle de la prise: à quelle espèce d’internationale suédo-espagnole vais-je appartenir si j’abandonne, même juste un peu, la prise marteau ?
- Pourquoi en 87 voit-on des gus jouer avec des serviettes éponges à damiers accrochées au shorts ?
Etc, à continuer.
ah la la tous ces détails… putain c’est trop bon!!!!!!!
Faire tourner la raquette comme une toupie, haut du cadre sur le sol, pour savoir qui va servir le premier
Faire rebondir 4 fois la balle avant de servir la première, ça porte bonheur.
quatre fois la première, trois fois la seconde. Comme Lendl. Il ne sortait JAMAIS de cette routine.
Merci d’avoir rendu explicite le sous-entendu.
Et naturellement, les Stones pour accompagner Laver/Emerson
Mon premier professeur était une curiosité génétique, une sorte de centaure-bonzaï. Il était court sur pattes, trapu, dense, musclé sous sa graisse, une forme de gallinacé avec un regard vide malgré ses très gros yeux de lémurien. Il avait une sciatique terrible, James Blake à côté c’est Noureev. Il était gesticulant et remuant, toujours en mouvement, quand il acceptait de venir donner cours.
Avant de prendre le pli, je l’attendais sagement au club pour le voir se pointe à 14:17 pour un court supposé débuter à 14:00 sharp; ensuite il s’échauffait longuement parce que « l’échauffement c’est au moins aussi important que le jeu ». Mouais, moi je ne raisonnais qu’en minutes qui passaient alors l’échauffement…
Quand il avait fini de gambader partout – avec le recul il y avait du Nadal en lui de ce côté – on pouvait commencer vers 14:28. Il arrêtait à 14:52 parce que quelque chose. Bref je payais une heure et jouais 25 minutes à tout casser. Sa technique était particulièrement laide, mais c’était un excellent pédagogue. Ah oui, je parlais de prendre le pli. Le truc c’est qu’il habitait à cinq minutes à pied du club, un ramasseur m’avait refilé l’info en me conseillant d’aller l’exfiltrer à chaque fois si je voulais avoir une chance de progresser. Je me faisais donc parachuter au club à 13:45 et encerclais seul sa maison. Le réveiller de sa sieste n’était pas une sinécure, mais le jeu en valait la chandelle; on commençait à l’heure désormais.
Tout ça pour découvrir que malgré sa bedaine impressionnante, il n’avait que peu d’essence en soute et son autonomie était limitée. Il posait ses fesses sur le banc à 14:32 et me demandait de faire des gammes de service. Enculé.
Je reviendrai
- Important: à l’époque (enfin, je sais pas quelle époque), TOUS les profs avaient des revers à une main.
- Mon premier prof fumait sur le court (indoor). Je ne pense pas qu’il y ai une relation de cause à effet avec le revers à une main, mais quand même, ça montre une autre époque.
C’est marrant ce que tu dis pour le revers. Je me souviens de mon prof qui s’est pointé un jour comme une furie et nous a expliqué comment il allait nous faire évoluer dans notre approche du jeu. ça devait être en 90, il venait de voir ses premiers matches d’Agassi dont je lui parlais depuis deux ans. Croyez-moi ou pas, à la fin de la séance il avait passé toute l’équipe au revers à deux mains. Enculé. Bilan j’ai eu les deux revers parce que je n’ai jamais su me décider ensuite (comme pour tant de choses dans ma vie). Je le faisais à une main pendant six mois, puis à deux mains pendant trois mois. Et les deux étaient assez bons, sans forfanterie. Selon que j’étais dans une période Agassi ou Sampras/Edberg, j’usais de l’un ou de l’autre.
je regrette d’avoir perdu du temps avec le revers à deux mains parce que ce n’est que devenu amateur statique que j’ai compris à quel point j’étais amoureux du revers à une main. A trente ans. Au début de mes courts quinze ans avant je détestais le revers. Le fou…
Cette affaire d’enseignement du revers dans les 80′s mériterait une enquête approfondie. Pour ma part, ayant abandonné tout ça en 88 (Agassi ?) jamais vu à l’époque un prof, et donc un élève, essayer quoi que ce soit à deux mains. A en douter même de l’existence de Borg, et Connors. En même temps, aurait-on vraiment écouté, que dis-je respecté, un prof à deux mains ? Moi, non.
Même mes potes fans de Wilander (sic) jouaient leur revers à une main, avec leur petites Rossignoles ridicules (pas d’ambiguité, jeune lecteur, la Rossignol est une raquette suédoise).
Aujourd’hui, je vois des profs, toujours à une main …Et des jeunes qui jouent à deux mains. A n’y rien comprendre.
J’avais vraiment développé une sorte de fétichisme pour le tennis. Quand j’étais ado mon père était passionné d’aviation, il volait comme pilote amateur dans des petits monomoteurs (Cessna 182) puis « on » est passé à des choses plus sérieuses (bimoteur). Mon frère aîné (qui a lui eu sa licence de pilote professionnel mais n’a jamais exercé ce boulot) et moi l’accompagnions les samedis voler. Pourquoi je vous dis ça? Si je vous dis que ma motivation était fortement influencée par le simple survol des courts de tennis d’Abidjan? Les courts de tennis et les piscines (je suis fasciné par l’eau, c’est la plus belle chose sur terre mais c’est un autre sujet) quand on survolait l’un ou l’autre j’étais en transe. Il y avait les clubs bien-sûr, connus de tous, mais les courts dans les domiciles privés, ceux qu’on ne peut envisager du sol, c’est ceux-là que j’aimais regarder et dénombrer.
Quand je voyais un court de tennis de manière fugace à la télé, c’était aussi « choquant » pour mon attention qu’une scène pornographique. Je me souviens de ma première année en Belgique; les premiers jours avant d’intégrer la fac je créchais chez ma cousine. Un soir elle zappait et est passée rapidement sur Becker vs Ivanisevic. J’ai tressailli, elle a noté les convulsions de mon corps et m’a demandé si je voulais regarder. Trop bien élevé j’ai décliné, sachant qu’elle aurait été au supplice. C’était au Masters, et quand j’ai lu dans tennis mag que ça avait été un des plus grands matches indoor de ces dernières années, je n’en ai que plus mal. Un des grands traumatismes de ma vie. Avec mon premier mille-feuille; j’étais tout gamin c’était à un annif, j’ai refusé le seconde tour qu’on me proposait, trop poli. Les autres ne se sont pas gênés et on exterminé la pâtisserie. J’en ai encore le goût sur la langue et l’amertume dans le cœur.
Je reviendrai
Ah la la Pierre tu m’as mis en émoi aujourd’hui, ça se bouscule dans ma tête et dans mon coeur.
Cooool !
Karim, tu nous fais une séance de thérapie tennistique?
T’as une façon de raconter tes petites anecdotes qui nous les rend attachantes.
Oh c’est bon ça … Les courts de tennis …Privés. Les invisibles. Ceux dont on découvre l’existence par hasard, au loin ou derrière une haie, en se disant que non de Dieu mais c’est bien sûr, ce grillage semble tout à fait avoir la taille exacte et réglementaire, et ne peut servir qu’à délimiter un court. Qui n’est pas un court municipal.
Voire: entendre du tennis. Se balader et tout à coup…Le Poc caractéristique.
A noter que Raonic a préféré s’inscrire à Acapulco pour jouer un 500 sur terre qu’à Delray Beach, où il aurait pu jouer un 250 sur dur.
Dubaï était trop éloigné géographiquement pour que ce soit une option.
Ca risque d’être la semaine de trop pour lui, vu qu’il reste sur 10 matchs en 14 jours et qu’il va tout à coup se retrouver sur terre face à des crocodiles.
Raonic veut montrer à Verdasco ce que c’est que jouer au tennis
Plus sérieusement, les Canadiens doivent jouer leur prochain match de Coupe Davis sur terre battue. C’est pour ça que Raonic veut se frotter à la surface.
Comme Guillaume évoque la Coupe Davis : la paire Tsonga / Sonfils étant forfait, Gilou pourra enfin montrer sa valeur.
Dans le reste de l’actualité:
- Ancic arrête. Pas eu de bol, ce joueur. Il aurait pu envisager une carrière confortable dans le top-20.
- Tsonga forfait pour la CD. On pourra bientôt changer la bannière du site: « Tsonga, dès qu’il voit un court de tennis, il se blesse ».
- Gasquet a battu Dimitrov. Inquiétant, non?
Merci pour ce texte, très beau et émouvant. Je ne suis pas du même âge, je n’ai pas connu cette époque, et pourtant je pourrais me reconnaitre quand même dans ton texte.
Après avoir lu tous les commentaires, je comprends finalement pourquoi j’aime le tennis. Il n’y a pas qu’une raison, mais une multitude de choses, qui, ajoutées, font le charme de ce sport. Je ne peux pas m’empêcher de sourire en vous lisant.
Le tennis, ça réveille tous les sens. L’odeur d’une balle, le bruit d’un coup droit qui claque, la vue d’un court, la sensation d’une raquette dans les mains, le goût de la victoire…
C’est vrai, mais en même temps, je pourrais faire pareil avec le foot:
- les copains qui crient « à moi »
- le gardien qui fait le plongeon de sa vie pour stopper une balle… qui sortait des limites du terrain
- l’odeur de l’herbe fraîchement coupée ou de l’orage s’approchant
- les copains qui te sautent dessus après un but marqué
Etc.
Si j’en parle, c’est parce que mon « amour » d’enfance, c’était le foot (je n’ai jamais joué en club pourtant). Je jouais déjà au tennis (en club), mais l’amour du tennis, lui, m’est venu plus tard.
» les copains qui crient « à moi »
plié de rire, c’est tellement vrai!!!!
Je suis bien d’accord. On peut parler ainsi de tous les sports. (Et même d’autres activités.)
On dit souvent, le sport est l’école de la vie. Ca peut paraitre cliché, mais c’est pourtant vrai.
Moi ce dont je me rappelle le mieux plus jeune, c’est les balles perdues, pas celles de Capri, celles qui atterrissent dans les jardins de particuliers ou derrière un grillage, qu’on ne peut pas récupérer.
Mon premier lien au tennis enfant était constitué de plastique noir pour la raquette et d’une balle jaune en mousse.
Le premier court que j’ai foulé était en terre battue et cela reste ma surface préférée, pas forcément pour le jeu qu’on y exerce mais pour l’aspect visuel que je trouve très beau, après vient le gazon.
Sinon les courts de tennis ont toujours été présent près de chez moi que se soit dans une résidence privée ou par la présence d’un club ou chez des copains.
Adulte, c’est le souvenir de mes enfants tout-petits faisant le tour du court à vélo pendant que moi et ma moitié on échangeait des balles. Aujourd’hui mon fils de 11 ans me met à 3 mètres de la balle et il s’en délecte bien…
J’aime toujours le tennis mais je n’ai pas vraiment de regret ni de nostalgie que ce soit lié à ma propre expérience ou par procuration.
« terre battue et cela reste ma surface préférée, pas forcément pour le jeu qu’on y exerce mais pour l’aspect visuel que je trouve très beau, après vient le gazon. »
moi itou